Création d’un « droit à l’erreur fiscale et/ou sociale »

Comme chaque année, la fin de l’été est synonyme de nouveautés législatives, parmi lesquelles la Loi pour un Etat au service d’une société de confiance (dite Loi Essoc). Cette Loi n’est pas dénuée d’intérêt notamment en ce qu’elle vient créer un « droit à l’erreur ». De quoi s’agit-il ?

Loi Essoc : le « droit à l’erreur » (enfin) consacré !

Il nous était annoncé depuis plusieurs mois déjà et ça y est, le fameux « droit à l’erreur » est instauré !

Dorénavant, et pour les contrôles engagés à compter du 11 août 2018, il est admis qu’un particulier ou une entreprise qui se trompe pour la 1ère fois en remplissant une déclaration d’impôt ou une déclaration sociale, soit parce qu’il a méconnu une règle applicable à sa situation, soit parce qu’il a commis une simple erreur matérielle (par exemple en se trompant dans les cases à cocher), ne soit pas pécuniairement sanctionné.

Vous l’aurez compris, le droit à l’erreur ne s’applique ni au défaut ou au retard de déclaration, ni au défaut ou au retard de paiement.

Cette absence de sanction pécuniaire suppose toutefois que la personne régularise sa situation, donc qu’elle corrige son erreur, soit spontanément, soit après avoir été invitée à le faire par l’administration et dans le délai qui lui a été imparti. Mais attention ! L’absence de sanction pécuniaire n’implique pas systématiquement l’absence de majoration ou d’intérêts de retard…

Notez que ce « droit à l’erreur » ne concerne que les personnes qui commettent une erreur de bonne foi : si la personne est de mauvaise foi, ou si elle a délibérément tenté de commettre une fraude, les sanctions pécuniaires pourront toujours être prononcées et ce, sans même que le contrevenant n’ait été invité à régulariser sa situation.

En cas de contestation, il appartiendra à l’administration de prouver que le contrevenant est effectivement de mauvaise foi.

Notez qu’il sera impossible de se prévaloir du droit à l’erreur pour certaines sanctions :

  • celles requises pour la mise en œuvre du droit de l’Union européenne,
  • celles prononcées par les autorités de régulation à l’égard des professionnels soumis à leur contrôle.

Loi Essoc : mise en place du « droit au contrôle »

Outre le droit à l’erreur, la Loi Essoc vient mettre en place un « droit au contrôle » : à compter du 11 août 2018, toute personne (particulier ou entreprise) peut demander à faire l’objet d’un contrôle fiscal, d’un contrôle diligenté par l’inspection du travail ou d’un contrôle portant sur ses déclarations de cotisations sociales.

Si au plan fiscal, la Loi Essoc vient entériner l’expérimentation menée depuis quelques années déjà auprès de certaines entreprises, son application en droit social est une véritable nouveauté.

Dans cette situation, la demande doit préciser les points sur lesquels le contrôle est sollicité. L’administration devra traiter cette demande dans un délai raisonnable (non déterminé à ce jour), sauf en cas de :

  • mauvaise foi du demandeur ;
  • demande abusive ;
  • demande ayant manifestement pour effet de compromettre le bon fonctionnement du service, ou de mettre l’administration dans l’impossibilité matérielle de mener à bien son programme de contrôle.

La décision prise par l’administration (fiscale, Urssaf, etc.) dans le cadre de la demande de contrôle lui sera opposable : concrètement, à l’occasion d’un contrôle ultérieur, elle ne pourra pas revenir sur la décision prise dans le cadre de la demande de contrôle, sauf à ce qu’un changement de circonstances (en droit ou en fait) ait affecté sa validité ou à ce qu’elle procède à un contrôle donnant lieu à de nouvelles conclusions expresses.

Notez qu’à l’issue de ce contrôle, le cas échéant, le demandeur bénéficie du droit à l’erreur.

Loi Essoc : un « droit à la régularisation » des erreurs sur les déclarations fiscales

  • Régularisation des erreurs et intérêts de retard

Au-delà du principe général d’absence de sanction pécuniaire automatique en cas de 1ère erreur constatée sur une déclaration d’impôt (le fameux « droit à l’erreur »), le montant des intérêts de retard dû pourra également être diminué en cas de régularisation de la situation par le contrevenant.

Rappelez-vous qu’en principe tout retard de déclaration et/ou de paiement, est normalement sanctionné par l’application d’un intérêt de retard calculé au taux de 0,20 % par mois de retard.

Depuis le 11 août 2018, la Loi Essoc prévoit expressément que dans l’hypothèse d’une erreur commise de bonne foi dans une déclaration fiscale, régularisée spontanément (hors procédure de contrôle fiscal) par le dépôt d’une déclaration rectificative accompagné du paiement des sommes dues, les intérêts de retard seront réduits de 50 %. Ils seront donc calculés au taux de 0,10 % par mois de retard au lieu de 0,20 %.

Cet abattement pratiqué sur le montant des intérêts de retard dus suppose donc que le contrevenant soit de bonne foi et que le dépôt de la déclaration rectificative soit accompagné du paiement des sommes restant dues. Notez que si la déclaration rectificative est déposée sans paiement, ou que le paiement n’intervient qu’après la date limite mentionnée sur l’avis d’imposition, le bénéfice de la réduction du montant des intérêts de retard sera conservé seulement si le comptable public accorde au contrevenant un plan de règlement (c’est-à-dire un échéancier).

Retenez que l’abattement de 50 % ne s’applique ni au défaut ou au retard de déclaration, ni au défaut ou au retard de paiement.

Par ailleurs, il est possible de régulariser une erreur, en cours de contrôle fiscal cette fois : dans cette hypothèse, les intérêts de retard dus sont réduits à hauteur de 30 % (soit un taux de 0,14 %).

Jusqu’à présent, cet abattement de 30 % n’était applicable qu’en matière de vérification de comptabilité et d’examen de comptabilité : il ne profitait donc qu’aux entreprises. Depuis le 11 août 2018, il est également applicable aux avis, aux propositions de rectifications, aux demandes adressées dans le cadre d’un contrôle sur pièces et aux examens de la situation fiscale personnelle : les particuliers peuvent donc en bénéficier au même titre que les entreprises.

La réduction de 30 % du montant de l’intérêt de retard s’applique également, en cas de non-paiement des suppléments d’impôts avant la date limite, dans l’hypothèse où le comptable public accorde au contrevenant le bénéfice d’un échéancier.

  • Amende liée à l’absence de déclaration de certaines commissions

Une personne qui, dans le cadre de son activité professionnelle, verse à un tiers des commissions, courtages et autres rémunérations qu’elle omet de déclarer à l’administration fiscale, s’expose normalement à une amende fixée à 50 % du montant des sommes non déclarées.

Néanmoins, par tolérance, l’administration admettait de ne pas appliquer cette sanction, sous réserve du respect des conditions suivantes :

  • il devait s’agir d’une 1ère infraction : il ne devait pas y avoir eu d’autres manquements au cours de l’année civile et des 3 années précédentes ;
  • la régularisation devait intervenir soit spontanément, soit à la 1ère demande de l’administration ;
  • la régularisation devait intervenir avant la fin de l’année au titre de laquelle la déclaration omise devait normalement être déposée,
  • le contrevenant devait produire une attestation des bénéficiaires des commissions, courtages, etc. précisant que les sommes omises avaient bien été déclarées par eux dans les délais impartis ;
  • l’administration devait être en mesure de vérifier l’exactitude des éléments fournis par le contrevenant.

La Loi Essoc est venue confirmer cette tolérance administrative et l’a étendue aux régularisations intervenant en cours de contrôle fiscal.

Cette disposition s’applique depuis le 12 août 2018.

  • Amende liée à l’absence de production de certains documents

Par principe, lorsqu’une entreprise omet de fournir à l’administration fiscale certains documents (tableaux de provisions, relevés de frais généraux, état de suivi des plus-values, etc.), ou lui transmet des documents mentionnant des informations incomplètes ou erronées, elle s’expose à devoir payer une amende égale à 5 % du montant des sommes omises. Sous réserve du respect de certaines conditions, cette amende peut être ramenée à 1 % du montant des sommes omises.

La Loi Essoc vient établir que cette amende (5 % ou 1 %) ne sera pas applicable en cas de 1ère infraction commise au cours de l’année et des 3 années civiles précédentes dès lors que le contrevenant a réparé son erreur soit de façon spontanée, soit à la 1ère demande de l’administration et ce, avant la fin de l’année qui suit celle au cours de laquelle le document devait initialement être présenté.

Attention, l’absence d’amende ne semble pas s’appliquer dans l’hypothèse d’une régularisation intervenant en cours de contrôle fiscal.

Cette disposition s’applique depuis le 11 août 2018.

Source : Loi n°2018-727 du 10 août 2018 pour un Etat au service d’une société de confiance (dite Loi Essoc)

Le « droit à l’erreur » : le tube de l’été 2018 ! © Copyright WebLex – 2018

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